Le chemin de carême est synodal. (édito du 26 février 23)

        Le carême est-il toujours perçu comme « le temps favorable et le jour du salut », ou tout simplement comme un devoir pesant et sans utilité réelle, ou encore comme une pratique d’un autre âge, comme le croient encore aujourd’hui de nombreux français? Pendant longtemps en tout cas, même dans certains milieux chrétiens, ce temps de l’année liturgique a été peint en grisaille de tristesse, on a cherché volontairement à n’en retenir que le côté ascétique, et plus exactement les contraintes, les privations et tout ce qu’on désigne par « visages de carême ». Il est donc tout à fait normal que beaucoup de nos contemporains aient du mal à reconnaître ce temps comme un temps de grâce. C’est pourtant le principal objectif du message du Pape François pour le carême 2023, intitulé : « Ascèse de carême, itinéraire synodal » et rendu public le 17 février dernier.

       Pour le Saint-Père en effet, le carême est une expérience d’ascèse, un  mot qui fait si peur aujourd’hui ; mais de quoi s’agit-il exactement ? Pratiquer l’ascèse c’est faire de l’exercice, tout simplement. Du point de vue spirituel, il s’agit précisément d’exercices qui nous désencombrent de nous-mêmes et nous rendent disponibles pour accueillir Dieu et pour faire de la place aux autres dans nos vies. Il y a en nous une foule de désirs qui très souvent débordent, nous sommes parfois envahis d’agitations et de passions qui nous font miroiter une vie de béatitudes, mais des béatitudes éphémères ou trompeuses. Nous savons bien que le salut c’est que nous arrivions à recentrer nos affections et nos forces sur le Christ, mais comment arriver à réformer notre vie ? C’est notre difficulté à tous. Il faut trouver le chemin !

         Eh bien voilà ! Réfléchissons bien ! Qui d’entre nous aimerait passer sa vie dans un capharnaüm ?  Nous faisons toujours en sorte, n’est-ce pas, que nos chambres et nos lieux de vie et d’accueil en général soient toujours propres, nous aimons mettre de l’ordre dans nos affaires personnelles : que le courrier et les factures soient bien rangés, que tout soit à sa place au bureau. Car une maison propre et bien rangée ça procure un agréable sentiment de bien-être, on est vraiment chez soi, on a l’esprit tranquillisé, les idées claires, beaucoup de liberté et d’envie d’aller toujours plus loin. L’ascèse qui nous est proposé durant le carême (ascèse corporelle, ascèse de la parole, des pensées et des sens en général), c’est de suivre le Christ derrière les apôtres Pierre, Jacques et Jean, de monter avec lui et avec eux, sur la haute montagne de la Transfiguration. Ça prend du temps et de l’énergie. Mais « Ce qui nous attend à la fin, dit le Pape, c’est sans aucun doute quelque de merveilleux et de surprenant, qui nous aidera à mieux comprendre la volonté de Dieu et notre mission au service du Royaume ». Il n’est pas d’excursion en montagne qui ne soit exigeante, il faut donc en montant, tenir le regard fixé sur le Christ et écouter ce qu’il dit, cela évite de trop vite se décourager et finalement de sombrer à nouveau dans la médiocrité

         Entrer en  carême, dit le Saint-Père en substance, c’est se mettre en chemin, mais, prévient-il, on ne fait pas carême tout seul. Le carême c’est un chemin synodal ; nous sommes responsables les uns des autres. Ce que nous faisons de bien ou de mal n’est jamais sans conséquence sur la Communauté et sur ses membres. « Jésus, dit encore le Saint-Père, on doit le suivre ensemble ». Le carême c’est une expérience aussi bien individuelle que collective, avec comme objectif, une transfiguration ou une transformation personnelle et ecclésiale.

       Voici donc le temps favorable pour un pèlerinage intérieur, voici le jour du salut, Pâques, qui se profile à l’horizon. Comme à Pierre, Jacques et Jean, le Christ aujourd’hui nous offre la grâce de passer avec lui de nos ténèbres à son admirable lumière. Ab Michel

Author: Olivier Bruna