« On ne naît pas chrétien, on le devient » Edito du P. Michel du 22 oct. 23

   Combien sont-elles dans nos familles et, parmi nos voisins, nos amis ou encore  nos collègues de travail, ces personnes fâchées avec l’Eglise mais qui avouent se reconnaître dans les valeurs de l’Evangile? Ce qui est certain, c’est qu’elles existent et elles sont même plus nombreuses que nous le croyons. Il s’agit pour la plupart d’hommes et de femmes d’âge mûr, des gens qui ont eu un passé chrétien plutôt chaotique, très douloureux même parfois;  mais ce sont aussi de jeunes adultes, des pères et mères de familles qui ont des griefs contre l’Eglise et sa morale trop désuète à leurs yeux. Le rapport de la Ciase l’an dernier a lui aussi scandalisé un grand nombre de jeunes et d’adolescents (cela se comprend !) ; il a en même temps, donné prétexte à beaucoup de chrétiens, de ceux qu’on qualifie de « sociologiques », de « s’en aller sur la pointe des pieds ». Ceux qui voudraient obstinément nous rendre responsables de tout ce qui ne va pas dans le monde, (la violence – celle de la traite négrière et de la colonisation par exemple – le racisme et l’antisémitisme et même aujourd’i la destruction de la nature) ce ne sont pas ceux-là.

                  Nous avons toujours reconhunu –l’Evangile n’en fait pas mystère – que les chrétiens ne sont pas tous des doux et des innocents ; nos communautés et nos paroisses ne sont pas toujours des lieux paradisiaques, non plus. Aujourd’hui comme au XVIIème siècle avec Pascal, nous reconnaissons qu’autour de nous « il y a peu de vrais chrétiens » et que nous n’en sommes peut-être même pas. Mais est-ce une raison suffisante pour que nous nous abstenions de poursuivre ce que de grands croyants avant nous, et parmi eux de nombreux saints, ont toujours considéré comme un devoir, c’est-à-dire d’ôter, quand l’occasion se présente, les préjugés que des gens ont de la religion ? Avons-nous le droit de nous dérober à cette mission qui consiste à montrer à nos contemporains ce qui fait l’excellence du christianisme. J’ai envie de penser que ce qui nous manque souvent c’est le courage d’un Tertullien ; Tertullien qui osait, les yeux dans les yeux,  parler, même aux grands de son temps, pour confondre les détracteurs de la foi chrétienne: « Regardez comme ils s’aiment », disait-il, au sujet des disciples du Christ. Et encore : « Voyez comme ils sont prêts à mourir les uns pour les autres », alors qu’au même moment, ceux qui les haïssent et réclament leur mort, se détestent et « sont plutôt prêts à se tuer les uns les autres ».

                   Pourquoi sommes-nous si réticents à partager notre foi ou à reprendre gentiment ceux qui la dénigrent et cherchent constamment à la noircir ? Pudeur, charité chrétienne ? Ce que nous oublions c’est que dans nos familles et nos communautés, nous avons des enfants, des catéchumènes, des recommençants et aussi beaucoup de « Nicodème » ;  c’est rassurant, ça fait énormément de bien à toutes ces personnes qui ont  la foi bien fragile, de se savoir protégées et accompagnées ; elles ont besoin de notre témoignage et nous le leur devons. Ce n’est pas faire du prosélytisme et puis qu’importe qu’on nous traite d’illuminés ! En fait la difficulté que nous avons c’est de faire le deuil de la chrétienté. Pendant longtemps en effet, le catholicisme en Occident a été la religion dominante et officielle ; les chrétiens catholiques durant de longs siècles n’ont rien su de ce que c’est que de vivre sa foi chrétienne et d’en témoigner avec pertinence, dans un monde qui n’est pas chrétien et sur « une terre étrangère». Il en résulte que beaucoup aujourd’hui encore se croient de bons chrétiens parce que nés dans un pays qui a toujours été catholique, qu’ils ont été baptisés enfants et que chaque année ils visitent un grand nombre d’églises et de basiliques, parmi les plus belles au monde. Tertullien leur dirait aujourd’hui : « On ne naît pas chrétien, on le devient ». On le devient, avec l’aide des autres, par une nouvelle naissance, quand on a découvert le Christ et la force surnaturelle qui émane de lui, quand on a eu la grâce de mourir au monde et à soi-même et qu’on arrive à dire comme l’apôtre Paul : « Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi ». Toute communauté chrétienne a vocation à devenir une communauté catéchisante. La nôtre le sera dès que nous serons assez nombreux à découvrir (puis à vivre en conséquence), que c’est en Christ et en lui seul, que l’être humain trouve son plus haut bonheur.                                                                                                                                                        

                                                                                                                                                    Ab. Michel

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Author: Olivier Bruna